Aragon et reflet de soi.
"Je suis plein du silence assourdissant d'aimer". Aragon.
Tiens, à propos de ma place sur la photo, cette maudite place que je chercherai ad eternam ...
Et si elle était là, au milieu du
reflet, entre l'ombre et le soleil, entre la réalité et son reflet de l'autre côté. Entre la vie et le néant, l'envie et le manque. Si c'était juste là ?
J'ai répondu deux fois au téléphone aujourd'hui, l'un des appels était le père de mes enfants.
"Il faut regarder le néant en face pour savoir en triompher." Le même Aragon
Ce reflet dans lequel toute la réalité a la tête en
bas. Je suis un reflet. Un reflet de maman fatiguée, qui doute, hésite,
chavire et bascule, à l'envers. Le reflet d'une fille qui ne sait plus
si demain va être mieux ou pire. Le reflet de mes mots lourds et de mes
silences qui en disent trop. Le reflet de cette fille que je connais
trop bien désormais.
J'ai lu des mots aujourd'hui qui m'ont fait pleurer, dans Julius Winsome de Gerard Donovan :
"Je me contentais en effet d'attendre la fin de
l'hiver. Existait-il ailleurs un autre endroit pour moi ? Aurais-je dû
aller à l'université et qu'aurais-je fais de ma vie si j'avais fait des
études ? Je ne m'étais jamais installé pour de bon, sans jamais partir,
et je sais que j'aurais dû mieux utiliser mes aptitudes
intellectuelles. Si je devais en une phrase résumer ma vie jusque là,
je dirais qu'à un certain moment j'ai vécu dans un chalet durant
cinquante et un ans."
La vie avec la tête en bas. La vie qui tourne et ne cesse d'être un reflet.
J'ai oublié de plier le linge ce soir. Encore un truc à faire à la va vite demain matin.
Oui c'est joli le reflet des choses quand on observe
bien. Dans notre envers, là où l'on est finalement que le côté virtuel de nous
même. Moi je vacille à l'envers. J'ai besoin de retrouver mon point d'équilibre.
Je me suis achetée un pot de verre avec une crème de coquelicot pour rendre la peau jolie et pour penser à autre chose, aussi.
J'entends des violons dans ma tête à l'envers, et des pianos au bout de mes orteils. Le doux pour apaiser le fort, l'aigu pour donner du relief au grave, ainsi va le reflet de cette Sarabande, encore et encore qui hésite entre m'aider à dormir et m'empêcher de rêver ...
J'ai mal à ma solitude du soir en ce moment, et puis à ma solitude du jour aussi, j'ai mal à ce grand qui ne sait plus quoi faire pour tenter d'améliorer l'ambiance, mal à ce petit qui reçoit nos peines. J'ai mal de n'avoir que deux bras, deux jambes et une seule tête pour un seul cœur un peu gros et las de tout ça.
Je ne fume plus depuis soixante dix jours et je l'écris en lettres grasses pour que cela semble encore plus long et fort, je n'ai pas envie de fumer, mais j'aimerais que les jours retrouvent la douceur d'avant ce traitement qui me détruit la tête.
Je crois qu'il est temps de ressortir la moto et d'aller chercher sur les routes ce que je ne trouve plus en moi, dans mes livres, ni derrière cet écran, la sérénité de vivre.
Trio de reflets d'ailleurs sur lit de soleil et âtre en feu accompagné de sa Sarabande du soir.